Perspectives sur les titres à revenu fixe : des trajectoires d’inflation divergentes à l’échelle mondiale

Examen des marchés et perspectives pour le T3 2025

POINTS ESSENTIELS

  • L’incertitude liée aux politiques et les tarifs douaniers accentuent la pente des courbes des taux malgré des données économiques modérées et des signes d’assouplissement.
  • Le Canada fait face à une inflation persistante, ce qui limite la marge de manœuvre pour des baisses de taux, tandis que l’Europe bénéficie de forces déflationnistes qui pourraient plafonner les rendements.
  • Le crédit demeure résilient, mais la sélection des titres et la gestion tactique de la duration sont essentielles dans cet environnement volatil.

Bien que M.  Trump soit susceptible de continuer à semer le chaos et à dominer le cycle de l’actualité, il reste à voir si son attention s’est détournée de la politique commerciale alors que nous arrivons à mi-parcours de l’année 2025. Le conflit entre Israël et l’Iran pourrait détourner l’attention des questions intérieures, mais des initiatives plus favorables au marché, notamment la déréglementation, pourraient être à l’ordre du jour, en particulier à l’approche des élections de mi-mandat aux États-Unis en 2026. La pause de 90 jours sur les tarifs douaniers réciproques, qui devait expirer le 9 juillet, semble désormais susceptible d’être prolongée pour les pays qui négocient de bonne foi. Le mercantilisme reste pleinement d’actualité; le sommet du G7 à la mi-juin devrait clarifier le lien entre l’augmentation des dépenses de défense des pays membres de l’OTAN et l’octroi d’un allègement tarifaire.

Comme nous l’avons souligné au trimestre dernier, nous continuons de tabler sur un atterrissage en douceur et une asymétrie des marchés des titres à revenu fixe. Le risque d’un « moment Liz Truss » (du Royaume-Uni) et d’un découplage des rendements obligataires à long terme s’est accru, mais reste peu probable. Les courbes des taux se pentifient généralement pendant les cycles d’assouplissement et la politique budgétaire, combinée au risque persistant de tarifs douaniers, a poussé les taux à long terme à la hausse, même si la croissance américaine s’est contractée au premier trimestre en raison d’un recul record des exportations nettes et de la constitution de stocks avant l’entrée en vigueur des tarifs douaniers. Les données économiques fondées sur les sondages et le sentiment (généralement utilisées comme indicateurs avancés) sont restées faibles au printemps, mais ont commencé à s’améliorer à mesure que le mois de juin avançait, tandis que les données économiques objectives (en temps réel ou différées) sont restées résilientes. L’indice des prix à la consommation de juin a été la quatrième surprise à la baisse qui, parallèlement à une certaine clarification concernant les tarifs douaniers, devrait donner à la Réserve fédérale américaine (la «  Fed  ») une plus grande confiance pour réduire les taux d’intérêt à un jour, à condition que les entreprises absorbent les augmentations temporaires des coûts plutôt que de les répercuter sur les consommateurs.

Alors que les États-Unis ont connu un affaiblissement des données qualitatives, le Canada a enregistré un affaiblissement tant des données objectives que qualitatives. Au deuxième trimestre, la Banque du Canada a maintenu ses taux inchangés à 2,75 % lors de deux réunions consécutives, mais les sept baisses de taux d’intérêt déjà effectuées pourraient suffire à conjurer la récession. La hausse des taux hypothécaires au renouvellement devrait être moins marquée que prévu, ce qui devrait, dans une certaine mesure, soutenir les dépenses de consommation et les bilans des banques. Alors que les données économiques restent plombées par l’incertitude et les tarifs douaniers, l’inflation sous-jacente est repassée au-dessus de 3  %. La Banque du Canada attend une meilleure visibilité sur l’économie et l’inflation avant d’assouplir davantage sa politique monétaire. Le marché ne table actuellement que sur une seule baisse supplémentaire de 25 points de base cette année.

À la suite de l’annonce des tarifs douaniers par M. Trump en avril, les rendements des obligations d’État canadiennes ont connu une pentification baissière. Malgré les vents contraires liés aux tarifs douaniers et à la baisse de l’immigration, le segment long de la courbe des taux a enregistré des résultats médiocres. Les gouvernements provinciaux et fédéral intensifient leurs mesures de relance budgétaire en recourant à des dépenses déficitaires pour atténuer les pressions économiques et diversifier les échanges commerciaux afin de réduire leur dépendance à l’égard des États-Unis. Toutefois, cette stratégie augmentera l’offre obligataire et pourrait accentuer les pressions inflationnistes. Pour l’instant, nous penchons plutôt pour le maintien ou la réduction de la duration. Cela dit, une détérioration importante de l’économie pourrait limiter les pressions inflationnistes et entraîner de nouvelles baisses de taux. Si un tel scénario se confirmait, nous envisagerions probablement de modifier notre position sur la duration.

Ailleurs dans le monde, la croissance économique en Europe s’est améliorée, mais reste inférieure à sa moyenne de long terme. Les dépenses en infrastructure et en défense, notamment en Allemagne, devraient offrir un soutien supplémentaire. De robustes forces déflationnistes persistent (croissance démographique négative, réglementations rigides et taxes élevées) qui devraient atténuer l’impact inflationniste de l’augmentation des dépenses déficitaires. Les rendements obligataires ont probablement atteint leur sommet. De même, en Chine, le PIB est bien en deçà de l’objectif de croissance de 5 % fixé par le gouvernement, qui engage des dépenses colossales pour soutenir l’économie. Dans cette nouvelle ère marquée par les tarifs douaniers, la délocalisation de proximité et l’économie d’affinité, la Chine ne devrait pas exporter la déflation vers le reste du monde comme elle l’avait fait par le passé. Le Japon reste un cas à part, avec des difficultés démographiques comparables à celles de l’Europe et une culture d’entreprise rigide. L’inflation, redevenue positive en 2022, s’est avérée persistante, au-dessus de l’objectif de 2  % fixé par la Banque du Japon, même si l’appréciation du yen a affaibli la compétitivité des exportations.

Des fondamentaux solides et un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande continueront de soutenir les obligations de sociétés. Compte tenu des rendements globaux élevés et de l’amélioration significative de la qualité, en particulier dans le segment à rendement élevé par rapport à ses normes historiques, les écarts de crédit pourraient rester plus serrés et plus longtemps que ne le suggèrent les modèles traditionnels. En théorie, des écarts de crédit serrés pourraient pousser les emprunteurs à accroître de façon considérable leur niveau d’endettement pour financer des rachats d’actions ou des acquisitions. Ce n’est cependant pas le comportement des entreprises que nous observons actuellement (voir le graphique ci-dessous), et nous ne nous attendons pas à ce que cela change à court terme. La même incertitude qui a paralysé le marché des PAPE incite les équipes de direction à jouer la défense, plusieurs émetteurs de titres de qualité supérieure proposant des obligations à long terme à des prix inférieurs à leur valeur nominale.

Nous avons conseillé à nos clients de rester tactiques sur les marchés des obligations d’État et d’entreprises, dans un contexte où l’administration Trump continue d’utiliser l’incertitude politique comme outil de négociation. Bien que nous estimions que la tendance générale des rendements obligataires soit à la baisse, la trajectoire ne sera pas linéaire. Il s’agit d’un environnement qui devrait favoriser les stratégies judicieuses et une sélection rigoureuse des titres, plutôt que la prise de risque pure et simple.

NOMBRE DE TRANSACTIONS MONDIALES DE FUSION-ACQUISITION

Source : Bloomberg Finance L.P., Apollo. Au 9 juin 2025

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À propos de l’auteur

Geof Marshall


Geof Marshall, CFA

Vice-président principal, Chef du revenu fixe et Directeur – Marchés Privés
Gestion mondiale d’actifs CI

Geof Marshall, Vice-président principal, Chef du revenu fixe et Directeur – Marchés Privés, s’est joint à Gestion mondiale d’actifs CI (GMA CI) en 2006 et dirige les efforts de l’équipe des titres à rendement élevé du groupe des titres à revenu fixe en plus de diriger le groupe des marchés privés. Geof est également le gestionnaire principal des stratégies de revenu de GMA CI et cogère les marchés privés et les fonds de revenu et de croissance ainsi qu’un certain nombre de portefeuilles de répartition d’actifs à revenu fixe. Il apporte plus de 25 ans d’expérience à son rôle chez GMA CI, en particulier dans la répartition d’actifs et l’analyse, la gestion et la négociation d’obligations de sociétés, de prêts à effet de levier et de crédit privé. Avant GMA CI, Geof était gestionnaire de portefeuille à la Financière Manuvie. Geof est détenteur du titre CFA et d’un baccalauréat en arts en sciences politiques de l’Université de Western Ontario. Il est également membre de la CFA Society Toronto et siège au comité d’investissement du Musée royal de l’Ontario.

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